Dossiers photographiques
- 16e siècle et avant: vues: horizontales, verticales; 19e siècle: vues: horizontales, verticales.
Le premier cercle extérieur présente des bâtiments publics (préfecture, haras, lycées) ou de belles villas qui évoquent un tourisme naissant. Lors de leur construction, ces bâtiments étaient dispersés au milieu des champs.
Les espaces libres se sont construits au 20e siècle; un développement qui se poursuit aujourd'hui et quand l'espace vient à manquer, les jolies villas de villégiature disparaissent, englouties par la spéculation immobilière.


L'histoire architecturale d'Annecy est une formidable éducation au relativisme; entre l'idée qu'on se faisait des bâtiments lors de leur construction (ou de leur construction projetée) et leur perception quelques dizaines d'années ou quelques siècles plus tard, il y a souvent un abime.
Les monuments les plus anciens et non des moindres (le palais de l'ile, le château, les maisons à arcades de la vieille ville) ont quasiment tous failli disparaitre à un moment ou à un autre, non par hasard ou par accident, mais parce qu'ils n'étaient plus au goût du temps.
Entre sa fonction de résidence princière et aujourd'hui celle de musée, le palais de l'ile a été prison, puis asile de vieillard et sa destruction envisagée à la fin du 19e siècle; il est classé monument historique en 1900.
C'est un peu la même chose pour le château. Edifice militaire à l'origine, il remplace le palais de l'ile comme demeure princière, mais il régresse au 17e siècle en simple caserne (ce qui est mieux que de servir de carrière de pierre et lui assure un entretien minimal, malgré la démolition du chemin de ronde et de certains bâtiments). Le système défensif protégeant l'entrée a malheureusement disparu. Le château est abandonné par l'armée en 1947. La ville autorise son occupation par des sans-abri jusqu'à un incendie en 1952. 40 ans de travaux seront nécessaires pour le transformer en musée (sans que le résultat actuel soit vraiment idéal).
Les rues à arcades, bâtiments de pierre construits au 16e et 17e siècles à la place des maisons de bois périodiquement la proie d'incendie sont elles même un peu plus tard la cible des rénovateurs. Dès le 18e siècle, l'architecte Charles Gallo préconise l'alignement des façades et la destruction des arcades. En 1863, la municipalité ordonne la démolition des arcades des rues Filaterie, Notre Dame, Grenette, Perrière et Sainte-Claire pour aligner les façades. Heureusement cette décision sera très peu appliquée; ces rues sont aujourd'hui le moteur du tourisme d'une des villes les plus visitées.
Dans le détail, Annecy a vu apparaitre la première maison des jeunes de France, un ensemble construit (1963-1974) par André Wogensky et Louis Miquel dans la continuité des idées de Le Corbusier.
12e au 15e siècle ↑
Le Palais de l'Ile est le bâtiment le plus emblématique de cette période.La partie la plus ancienne est contruite au 12e siècle comme maison forte. Le bâtiment est transformé en demeure princière de la maison de Savoie au début du 15e siècle, puis devient au 16e siècle le siège d'institutions genevoises: prison, palais de justice, conseil et chambre des comptes. Le bâtiment perd progressivement toutes ses fonctions, la dernière étant celle de prison lors de la révolution française. A la fin du 19e les lieux deviennent asile de vieillards. Le romancier André Theuriet et l'architecte Charles Suisse le sauvent de la démolition et permettent son classement comme monument hitorique en 1900.
La façade triangulaire sud, la plus photographiée, abritait une chapelle. Avec le quai des vieilles Prisons et le quai de l'ile, l'ensemble forme un paysage urbain iconique de la ville d'Annecy.
Palais de l'Ile (Annecy). Sur Archi-wiki.org.
Tout aussi emblématique de cette période est le château.

La ville est longtemps restée enfermée dans ses remparts. Une première enceinte comprenant les portes d'Ysernon (actuellement renommée porte Sainte-Claire), Perrière et Filaterie (aussi nommée Notre-Dame) a été agrandie au nord-est au 14e siècle avec la création des portes du Pâquier et de Bœuf (aujourd'hui disparues); ces remparts sont alors bordés par des douves (le canal Saint-Dominique pour la première enceinte, le canal du Vassé pour la seconde). Outre quatre portes, ne subsistent aujourd'hui que quelques dizaines de mètres de l'ancien rempart, le long du passage Gruffaz; et le canal du Vassé est partiellement recouvert par la rue Vaugelas qui, avec le passage Gruffaz, suit l'emplacement de la seconde enceinte. il est aujourd'hui question de découvrir le canal Saint-Dominique là où il est recouvert par la rue Camille Dunant.
Vers le 15e siècle le faubourg Sainte-Claire est intégré à l'enceinte et une nouvelle porte de l'Ysernon est crée (nommée aujourd'hui porte du Saint-Sépulcre). Des incendies détruisent une grande partie de la ville en 1412 puis en 1448.
16e siècle ↑
En 1563, un canal allant du Thiou au Vassé est creusé, coupant le pré Lombard (ainsi nommé car possession de banquiers lombards) en deux; une ile est délimitée où on isole les contagieux lors des épidémies de peste. C'est le début de la construction des bâtiments en pierre à arcades.17e siècle ↑
La représentation n'est pas totalement fidèle (les murs du château sont défensifs et présentent bien moins de fenêtres qu'il en est représenté), mais elle situe bien la ville médiévale dans ses remparts.
L'ordre de la visitation est fondé en 1610 dans la maison de la galerie (demeure de plaisance acquise par François de Sales et Jeanne de Chantal rue de la providence). Rapidement devenu trop petit ce bâtiment est abandonné et un nouveau monastère est fondé en 1636 place aux bois. L'église liée à l'époque au monastère est actuellement nommée église Saint François. Jeanne de Chantal meurt en 1641.
L'hôtel de Sales est construit entre 1688 et 1690. Résidence de prestige, il accueille au 18e siècle les princes de la maison de Savoie lors de leurs séjours (Confisqué comme bien national en 1792, le bâtiment devient le siège de l'administration du département puis un tribunal correctionnel. Après 1815, l'édifice accueille le siège de la première Banque de Savoie). Au-dessus des arcades, quatre bustes illustrent les quatre saisons, thème très apprécié au 17e siècle: le printemps est reconnaissable avec sa couronne de fleurs ; l'été avec sa chevelure d'épis de blé; l'automne avec ses rameaux de vignes et de grappes de raisin et l'hiver sous les traits d'un vieillard trapu habillé chaudement.
18e siècle ↑
Au début de ce siècle, la moitié de la ville appartient toujours à des ordres religieux. La Révolution, avec l'entrée des troupes françaises en Savoie en 1792, va bouleverser cette situation entraînant le départ de toute une population de nobles et de religieux. On assiste à une reconversion spectaculaire des couvents en usines. Comme d'autres les religieuses de la visitation sont chassées de leur monastère. En 1794, Thomas-Dominique Ruphy dessine une voirie rectiligne dans les grands axes de circulation, épargnant du même coup le quartier historique.19e siècle ↑
Les remparts sont abattus, les portes du Pâquier et de Bœuf sont démolies (1822, 1825), la rue Royale, longtemps appelée rue Neuve, et l'avenue de Chambéry sont crées (respectivement en 1823 et 1824), puis des quais aménagés le long du Thiou en 1854.L'ordre des Visantines est rétabli en 1805 par Napoléon, et des religieuses souhaitent se rétablir dans leur ville d'origine. En 1822, l'évèque d'Annecy ne parvenant pas à racheter les bâtiments de premier monastère de la visitation fait construire un nouveau monastère (achevé en 1824) le long de la toute nouvelle rue Royale et en pleine campagne.
Mais le bâtiment est construit trop vite et se révèle fragile tandis le site se retrouve vite au centre de la ville en face de la nouvelle gare du chemin de fer. A partir de 1835, les bâtiments du premier monastère de la visation sont restitués à un usage religieux et occupés par les soeurs de Saint-Joseph. La façade de la chapelle est reconstruite après 1860 par l'architecte lyonnais Léon Charvet, architecte de la Préfecture de Haute-Savoie.
Le Clos Lombard, devenu un temps bien national à la révolution puis revendu est racheté par la commune et relié à la terre ferme (le canal creusé en 1563 est recomblé); le nouvel hôtel de ville d'inspiration sarde est construit (1847-1855) sur cette plate forme. Il remplace un bâtiment élégant, toujours visible à côté de l'église Notre Dame de Liesse, qui datait lui de 1770 et devenu bien trop petit.
Dans la rue Royale Fabien Gruffaz ouvre en 1852 l'hôtel d'Angleterre, le premier hôtel de prestige d'Annecy. Les curistes d'Aix-les-Bains et les voyageurs en route vers les Alpes y font halte. En 1869, la direction de cet hôtel finance l'ouverture des Gorges du Fier et le chalet du Semnoz.
Le chemin de fer arrive en 1866 peu après le rattachement de la Savoie à la France.
La ville se dote de nombreux équipements, construits sur des terrains d'expansion à l'extérieur de l'ancienne enceinte: un casino théâtre rénové (1863, aujourd'hui disparu), un hôpital aux Marquisats (1864), une préfecture avec une gendarmerie et une maison d'arrêts (l'ensemble en 1865), un nouveau haras (1888).
La superficie bâtie double entre 1850 et 1900 (Mazard, 2005). La rue Vaugelas recouvre une partie du canal de Vassé qui bordait les anciennes fortifications (1885).
Habitation construite en 1893-1894 pour loger des familles ouvrières. La décoration de la façade est particulièrement soignée.
20e siècle (détails) ↑
Le deuxième monastère de la visitation qui se situait rue Royale est reconstruit (troisième monastère) sur des terrains situés au dessus du château (la translation des reliques de Saint-François de Sales et de Jeanne de Chantal donne lieu à une procession grandiose en 1911 et l'ancien monastère est détruit et remplacé par l'actuel quartier de la poste). La basilique de la Visitation, voisine du monastère et achevée un peu plus tard (1930) se dresse sur les contreforts du Semnoz et est visible de toute la ville. L'architecture est imposante, mais seul le carillon qui comprend une cloche de 4 tonnes est classé monument historique.Le tourisme se développe avec la construction de l'Impérial Palace (1913) qui remplace la jolie Villa Ruphy. L'architecture de l'Impérial s'inspire du château français du 17e siècle. La plage municipale voisine, agrémentée de plongeoirs est inaugurée en 1935. Mais l'hôtel sert d'hôpital pendant la seconde guerre mondiale, puis ferme en 1965 alors qu'il est devenu possession de la municipalité. la dégradation du bâtiment s'accélère après un incendie en 1981 et il faudra attendre 1990 pour sa rénovation en hôtel de luxe.
Au début du 20e siècle la construction d'autres hôtels accompagne celle de l'Impérial, et plusieurs navires à vapeur sont lancés sur le lac (ont Le France, en 1909). Les projets d'aménagement du Pâquier (construction d'un casino) et d'alignements urbains dans la vieille ville du début de siècle seront par chance abandonnés.
Les années 1950 ont été marquées par un accroissement considérable de la population. Annecy comptait environ 27 000 habitants en 1946, 33 000 en 1954 et 55 000 en 1968, un doublement en vingt ans pour une ville qui n'avait rien de "nouvelle". Cette époque est marquée par des projets architecturaux qui seraient irréalisables aujourd'hui et ont déjà suscité, en leur temps un début d'opposition (cf Front de lac). La préservation des bords du lac est aujourd'hui devenue un objectif soutenu par une partie importante de la population, ce qui suscite des débats très vifs avec certains des décideurs.
L'un des architectes qui a le plus travaillé sur Annecy est Maurine Novarina. Il intervient comme coordonateur en traçant les plans de masse du front de lac (avenue d'Albigny) et de la ZUP de Novel, mais aussi comme concepteur de nombreux bâtiments.
La ville est aujourd'hui confrontée à la transformation de la vieille ville (les rues autrefois à l'intérieur des anciens remparts) en un ghetto touristique, à la concentration excessive d'activités au bord du lac, à la difficulté des déplacements. La voirie tracée au 18e siècle par Thomas-Dominique Ruphy bien avant le développement de l'automobile se révèle trop étroite et les transports urbains sont extraordinairement sous-développés sans compter que la voie ferrée Aix-les bains - Genève sépare la ville en deux.
Références
↑ 2013. Tirez la Chevillette, la porte forme et symbolique. Livret de l'exposition, Musées d'Annecy.
Sylvie Mazard & Pierre Vallet. 2005. Itinéraires d'architecture. Agglomération d'Annecy. XXe siècle. Editions Comp'Act; CAUE de la Haute Savoie.
L'Essor Savoyard du 28 janvier 2010.
les plus hauts immeubles d'Annecy (la liste est limitée au centre ville et oublie les immeubles du quartier de Novel, sans compter les communes périphériques désormais fusionnées avec Annecy).
Sylvie Mazard & Pierre Vallet. 2005. Itinéraires d'architecture. Agglomération d'Annecy. XXe siècle. Editions Comp'Act; CAUE de la Haute Savoie.
L'Essor Savoyard du 28 janvier 2010.
les plus hauts immeubles d'Annecy (la liste est limitée au centre ville et oublie les immeubles du quartier de Novel, sans compter les communes périphériques désormais fusionnées avec Annecy).
Bibliographie
CAUE Haute Savoie.
2010. La Haute Savoie en construction, 1860, 2060. Exposition.
. Maurice Novarina, un architecte dans son siècle. Journal de l'exposition (pdf).
2017. Intervenir sur l'architecture du XXe siècle. Dossier pédagogique. Union régionale des CAUE Auvergne-Rhône-Alpes.
Les monuments classés (Wikipédia).
Les monuments historiques classés et ceux du label XXe siècle (Actuacity).
Theatrum sabaudiae vol.3. Sur le site des archives de la Haute-Savoie.
Annecy en 1889: plan Mangé. Sur le site du patrimoine de la région Auvergne-Rhône Alpes.