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Dossiers photographiques

La basilique royale de Saint-Denis a perdu la popularité dont elle disposait au Moyen-Age; elle est aujourd'hui très loin de recevoir le nombre de visiteurs que son passé justifierait. Berceau de l'art gothique (initialement dénommé art français ou Opus Francigenum en latin), sépulture des rois de France depuis Clovis, son histoire est complexe, parfois glorieuse, parfois triste, tourmentée toujours; le monument a été construit, déconstruit, reconstruit, défiguré, restauré, et c'est ce qui le rend passionnant. L'église a été classée monument historique en 1862 et elle figure sur la liste indicative (tentative list) déposée par la France pour l'inscription au patrimoine mondial de l'UNESCO depuis 1996. L'église est toujours consacrée à la religion catholique; elle constitue une paroisse vivante particulièrement active et multiculturelle, ouverte au monde par les caractéristiques de ses fidèles.
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La façade ouest, gravure de François-Nicolas Martinet, 1780. Domaine public, Crédit Wikimedia.
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La façade ouest en 2015; © CC by SA, Thomas Clouet / Wikimedia

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La Chapelle d'Huiduin, édifiée en 832 et reconstruite en 1140 par l'Abbé Suger; © Michel Racine.

L'histoire du monument tel qu'il est visible aujourd'hui commence en 832 par la construction d'une église semi-enterrée par l'abbé Hiduin; il en subsiste la partie centrale (fortement remaniée); à cette époque, ce petit édifice se situe à l'est de l'église carolingienne principale (80m de longueur, une centaine de fenêtres). Les travaux les plus novateurs sont menés par l'Abbé Suger qui remplace l'abside et la façade de l'église carolingienne. Il faut bien comprendre que l'église d'Hilduin n'est pas l'origine du monument mais seulement ce qui en reste visible aujourd'hui.

Interprétation du monument 


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L'Abside au niveau chapelle d'Hilduin (crypte), 1140, Abbé Suger; © Michel Racine.
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Le déambulatoire, 1140 Abbé Suger; © Michel Racine.

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Le déambulatoire, derrière l'autel des reliques; © Michel Racine.
L'abside actuelle est surélevée pour être construite sur et autour de la chapelle d'Hilduin. A partir de cette époque les architectes successifs ont toujours eu à coeur de préserver les parties les plus emblématiques du monument précédent, malgré l'évolution des goûts et des modes.

Construit en trois ans, de 1140 à 1144, le sublime déambulatoire entourant le choeur de la basilique constitue le premier chevet gothique au monde, un coup d'essai qui était un coup de maitre. Restant à taille humaine, l'envolée des piliers laisse un espace baigné de lumière et provoque l'émotion aujourd'hui comme au premier jour. (Les lumières colorées apparaissant sur un des piliers résultent d'une installation temporaire de 2024: "Crescendo" de Stephen Dean).

Mais de même que les murs et les voutes étaient largement peints, les fenêtres ne pouvaient se contenter de verre blanc. Pour Suger les vitraux ornant les baies du chevet sont aussi importants que les murs de l'édifice; de fait les murs laissent la place à une présentation quasi continue de figures colorées de lumière. Une innovation exceptionnelle.

Pillé pendant la guerre de Cent Ans et les guerres de Religion, le site connait des heures sombres, avec notamment la disparition du tombeau de Saint Louis au 15e siècle.

Préservés un temps lors de la révolution et de la profanation des tombeaux des rois (les plombs des vitraux ultérieurs du 13e siècle sont les premiers à être fondus), les vitraux du 12e siècle sont déplacés par Frédéric Lenoir dans un musée des monuments français; les vitraux rescapés regagnent Saint-Denis en 1816. François Debret débute des restaurations en 1846 et en replace certains mais de nombreux panneaux manquent et Debré reconstitue quelques verrières en rassemblant des panneaux sans rapport les uns avec les autres. Il doit très vite abandonner sous les critiques de Viollet le Duc qui le remplace. Chaque transport et chaque restauration occasionnent des bris partiels et des pertes. C'est pourquoi aujourd'hui, on trouve des fragments des vitraux de Saint-Denis dans différents musées, dans des églises anglaises et dans bien des pays du monde (sans doute plus hors Saint-Denis qu'à Saint-Denis). Une page est dédiée aux vitraux.

La façade est commencée en 1135; à la mort de Suger, ou au plus tard en 1219; elle est symétrique, à deux tours (Formigé, 1960: p.77); elle nous parait aujourd'hui un peu minimaliste (mais pas parce que la symétrie à disparu); pourtant, à l'époque, les trois portails sont flanqués de statues colonnes et une petite rose enjolive la partie centrale, éléments qui sont tous les premiers du genre.

Le chantier ne reprend que 70 ans après la mort de Suger, en 1231; la partie basse du chevet est conservée et les parties hautes démontées, pour en élever la hauteur et assurer la continuité avec la nef.

La tour nord est incendiée par la foudre en 1219. Elle sera reconstruite d'apparence à peu près identique en même temps que la nef au 13e siècle, mais conçue pour supporter une flèche de pierre atteignant 84 m de hauteur; ce qui lui permettant de surclasser Notre-Dame de Paris comme plus haut monument d'Ile de France.

La façade faisait partie de l'enceinte de l'Abbaye de Saint-Denis et son aspect défensif a été renforcé pendant la guerre de cent ans; l'impression de forteresse (soutenue par la présence des crénaux) que peut donner cette façade n'est sans doute pas imaginaire, mais peut aussi faire référence à la Jérusalem céleste. Une enceinte de protection accompagnée d'un fossé a été cependant en place jusqu'au 16e siècle une vingtaine de mètres seulement en avant de la façade (Formigé, 1960: 32). On entrait par le portail central de la basilique après avoir franchi un pont levis.
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La basilique et le monastère, vers 1600; centre des Monuments nationaux; © CC by NCSA (attribution: Michel Racine, pas d'utilisation commerciale)

L'enceinte de protection de la façade est visible sur la maquette, mais non le fossé.

Des chapelles sont aménagées au 15e siècle contre l'aile gauche de la nef. Les 20 statues-colonnes qui embellissaient les portails ont été déposées par les moines en 1771, lors d'une réfection globale de la façade.

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Tête de statue colonne; David; musée de Cluny; © CC by NCSA (attribution: Michel Racine).
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Tête de statue colonne; la reine de Saba; musée de Cluny © CC by NCSA
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Tête de statue colonne; un prophète; musée de Cluny © CC by NCSA (attribution: Michel Racine)

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Statue colonne; un roi; dessin d'Antoine Benoist, 1729; domaine public.
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Statue colonne; la reine de Saba; dessin d'Antoine Benoist, 1729; domaine public
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Tête de statue colonne; un prophète; dessin d'Antoine Benoist, 1729; domaine public


Certaines de ces têtes de statues, présentes dans des collections américaines étaient connues depuis assez longtemps, mais leur provenance discutée; Ce n'est qu'en 1976 que trois têtes, retrouvées dans des collections françaises ont confirmé l'origine de l'ensemble; placées initialement sur les portails de la façade (ouest), 3 têtes des 20 statues sont aujourd'hui présentées au musée de Cluny, à Paris. Les statues avaient été dessinées par Antoine Benoist (édité par Bernard de Montfaucon, 1729), mais la véracité de la représentation mise en doute ensuite. Taillées dans un calcaire à milioles très dur leur fraicheur frappe immédiatement. Les dessins de Benoist nous laissent imaginer la spendeur et l'effet de l'ensemble. Certaines des têtes possédaient des pupilles de verre coloré et les statues étaient peintes.

Il nous est aujourd'hui difficile de comprendre quelles motivations ont conduit les moines à cette action, un acte qu'on peut avec le recul qualifier de saccage. A Notre-Dame de Paris c'est le besoin d'élargir les portails pour les processions qui a provoqué leur destruction partielle, un argument qui ne semble pas tenable pour Saint-Denis où seul le trumeau central sur lequel s'adossait une statue de Saint-Denis a été déposé (la largeur des portails de Saint-Denis a été conservée). Quelques statues avaient été dégradées par les huguenots au 16e siècle, un autre motif possible? Heureusement les têtes en bon état ont été mises de côté (mais on est loin de les avoir toutes retrouvées). A noter qu'à la même occasion, le sol a été élevé de plus d'un mètre côté façade, réduisant la hauteur des portails (Formigé, 1960: 37).

La charpente était en châtaignier et couverte en plomb. Une petite flèche en charpente se trouvait à la croisée du transept.

En 1793, après la révolution, les sépultures royales sont saccagées, mais les gisants (sculptures) sont préservés: seuls les symboles de la royauté disparaissent (sceptre, etc.). Le plomb d'une partie des vitraux (les plus récents) est récupéré par les révolutionnaires, de même que celui de la toiture. Les vitraux du déambulatoire sont préservés, mais la basilique est sans toiture et en partie utilisée comme entrepôt. En 1799, Alexandre Lenoir, conscient de leur énorme valeur artistique et historique, entreprend leur déplacement dans un musée des Monuments Français (consultez la page dédiée aux vitraux).

Jacques Legrand s'est vu confié la restauration de l'édifice par Napoléon 1er. En urgence, il établit une toiture en ardoise et abaisse les combles; les baies du triforium sont privées de lumière.

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La rose de la façade ouest, transformée en horloge au 16e siècle, remplacée en 1843 par François Debret; démontée par Viollet le Duc, restaurée en 2015. © Michel Racine

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La rose après dépose de l'horloge par Viollet le Duc (photographie de 2010). CC by SA 2.0 Auteur: Spencer Means

A partir de 1813, François Debret devient l'architecte officiel. Il entame de grands travaux de réfection; il restaure et décore la façade avec le sculpteur Joseph Bru. Debret restaure les deux grandes roses du transept qui étaient en ruine (des fragments des roses initiales ont été retrouvées en 1998 lors de fouilles dans le jardin nord). L'horloge de la façade, conçue par Bernard-Henri Wagner en 1834, est installée en 1843 (en remplacement d'un instrument préexistant tombé en panne qui masquait totalement la rose de pierre).

Et si la blancheur de la façade ouest nous éblouit aujourd'hui, il ne faut pas oublier qu'elle était peinte à l'origine, avec certitude pour les portails. La restauration de 2015 a permis de retrouver des traces de polychromie datant du 16e siècle. En 1840, Debret répare la flèche touchée par la foudre en 1836; il établi un projet de reconstruction de la toiture, réalisée en cuivre, dans sa pente initiale et sur une charpente de fer (inspirée des travaux de Chartres); le triforium retrouve sa luminosité. Les portes remplacées en 1771 ont perdu peu après leur bronze, fondu lors de la révolution; les portes actuelles sont des restaurations de Debret.

Malheureusement de nouveaux problèmes apparaissent, en partie dus à nouvelles tornades (mais on a aussi accusé Debret d'avoir fait des erreurs dans la restauration), conduisant au démontage minutieux de la flèche à partir de 1842. Une polémique crée par Prosper Mérimé et la commission des monuments historiques, qui se sentaient écartés, s'apparente à une querelle "des anciens et des modernes" transposée en architecture. Debret démissionne en espérant être remplacé par son beau-frère, mais c'est Viollet le Duc qui profite de la situation. La polémique n'est pas vraiment éteinte aujourd'hui; chacun pouvant accuser l'autre de ne pas avoir respecté le passé (en fait, Debret et Viollet le Duc sont, chacun à leur manière, à classer dans les modernes).

Debret s'intéressait beaucoup aux détails décoratifs et à la polychromie; dans l'exposition du Centre des Monuments Nationaux de 2019, il est qualifié d'architecte "romantique", mais ses restaurations s'appuyaient sur une documentation minutieuse et respectaient au mieux l'existant (restauration restitutive). Ses détracteurs ont utilisé ses créations polychromiques (sans doute un peu exubérantes par rapport aux goûts de l'époque et peut-être par rapport à ceux d'aujourd'hui) contre lui.

Il innovait aussi (comme dans sa reconstruction de la toiture sur une charpente de fer), à une époque ou aucun chantier de restauration médéviale d'ampleur n'avait encore été mené en France (CMN, dossier de presse 2018).
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Projet de Viollet le Duc pour la façade ouest, 1860. Domaine public.

Viollet le Duc était un passionné du Moyen-Age et avait l'ambition de construire "plus gothique que le gothique". C'était un architecte romantique, comme Debret, et ils ont exagéré leur divergences. A Saint-Denis, Viollet le Duc a sûrement démonté plus que de nécessaire, peut-être dans l'espoir d'y reconstruire la "cathédrale idéale"?

Malheureusement les finances de l'Etat n'étaient pas à la hauteur de son projet, si tant est qu'il ait été réalisable, la tour sud n'ayant jamais été conçue pour supporter une flèche. Viollet le Duc se contentera d'exercer son imagination sur la restauration des dallages et des verrières du déambulatoire. Il va surtout s'attacher à défaire ce que Debret avait fait. La transformation la plus visible est le démontage total de la tour nord, plus ou moins justifiée par des faiblesses apparues dans le fondations; la façade devient dissymétrique. La toiture restaurée par Debret échappera à cette rage destructrice (ainsi que les verrières à griffons, les vitraux de la nef, des roses nord et sud du transept). Contrairement aux idées reçues, Viollet le Duc ne s'opposait pas à Debret sur la polychromie et a même pousuivi son travail, détruit par les architectes du 20e siècle.

Napoléon 1er n'ayant pu se faire enterrer sur place, la basilique va tomber dans l'abandon.

Les études menées au début du 21e siècle ont permis de retrouver les traces des polychromies successives (Barbara Trichereau et al. 2015) et la façade est restaurée en 2015, rétablissant en partie le travail de Debret; une exposition installée dans le déambulatoire lui rend hommage en 2019.

Le maitre autel, de Vladimir Zbynovsky, a été installé en 2018. Le socle en travertin d’Arménie surmonté d'une dalle de verre ménage une fenêtre en croix qui éclaire la crypte où, selon la légende, se trouvent les reliques.

L'origine d'une popularité exceptionnelle ↑ 

Les nombreuses fouilles réalisées de l'époque de Viollet le Duc à nos jours on révélé l'existence de plus de 15 000 sépultures et chaque fouille permet d'en découvrir de nouvelles. Elles débutent à l'époque pré-chrétienne puis le lieu se christiannise vers le 3e siècle; les tombes sont souvent riches (quand elles n'ont pas été pillées). Les lieux sont donc sacrés depuis la nuit des temps.
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Bijoux de la reine Arégonde, circa 565-590; crédit musée nationaux.

Le début de l'histoire est en fait légendaire. Celui qui va prendre le nom de Saint-Denis et ses compagnons sont-ils décapités puis enterrés près de Montmartre ou un peu plus au nord ? Au 5e siècle la nommée Sainte-Geneviève (patronne de Paris) fait édifier à Saint-Denis la première église d'une vingtaine de mètres de longueur (Romero, 1992: 17). Les corps de Saint-Denis et ses compagnons auraient-ils été transférés en 627 depuis leur premier lieu d'unhumation ?

En 1959, Michel Fleury découvre le sarcophage d'une reine mérovingienne, Arégonde, inhumée entre 565 et 590. Ses vêtements ont pu ête reconstitués et les riches bijoux découverts déposés au musée du Louvre.

Dagobert enrichi considérablement l'édifice et les restes attribués à Saint-Denis devenus des reliques sont placés dans des cercueils d'argent. Dagobert meurt à Saint-Denis où il se fait enterrer en 639 (Romero, 1992: 29). L'abbaye naissante de Saint-Denis est placée sous l'autorité directe du pape et du roi et partiellement exemptée d'impôt. Childebert, un des fils de Dagobert fait passer l'église de 20 m à 50 m. Mais 100 ans plus tard la dynastie mérovingienne agonise.

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La crypte archéologique: les plus anciens sarcophages datent du 6e siècle. © Michel Racine
Un aristocrate, Fulrad organise l'alliance entre Charles Martel, son fils Pépin le Bref et l'abbaye. Charles Martel est enterré à Saint-Denis et Pépin le Bref y est couronné roi. En sept ans de 768 à 775 Fulrad reconstruit une église somptueuse (la troisième), en forme de croix latine, de 80 m de longueur.

Hilduin, un éclésiatique érudi en grec entreprend d'assoir la popularité de l'église sur des bases plus solides, c'est à dire sur des mythes. Réécrivant l'histoire (il n'hésite pas à créer de faux documents), il fait de Saint-Denis à la fois l'Evèque de Paris et le compagnon de Saint-Paul (une invraissemblance temporelle) et utilise le miracle populaire à l'époque de la cépalophorie: Saint-Denis aurait marché depuis le lieu de son exécution jusqu'à celui de son inhumation, en tenant sa tête dans ses mains. L'abbaye est désormais équipée d'un saint exceptionnel, reliques et miracles à l'appui (Romero, 1992: 38). Pour faire bonne mesure, on "découvrira" plus tard que les reliques se sont enrichies d'un fragment de la couronne du Christ et d'un clou de la crucifixion. Tout cela ne s'est pas fait sans contestation: l'abbaye de Longpont prétendait posséder une tête de Saint-Denis, Notre-Dame de Paris la partie supérieure du crâne et des reliques auraient été ramenées d'orient à Rome par la première croisade.

Les royaumes de ce qui n'était pas encore la France se font et se défont (les Capétiens remplacent les Mérogingiens qui ont remplacé les Carolingiens: Suzanne Citron, ) mais le mythe est toujours là. L'abbé Suger va restaurer la prospérité de l'abbaye qui déclinait. Lorsque Suger entame la reconstruction, les foules de pélerins qui se pressent dans la basilique carolingienne sont si denses que certains meurent étouffés.

Reconstruire la flèche, oui, mais laquelle ? ↑ 

Ce titre fait allusion à la flèche de Notre Dame de Paris pour la reconstruction de laquelle sponsors et fanatiques de Viollet-Le-duc ont fourni des sommes considérables. Moins de fées se sont penchées sur la cathédrale de Saint-Denis qui pourtant le mérite tout autant. C'est pourquoi il est possible de parrainer une pierre de la flèche.

Sivez la flèche. Le site officiel des monuments historiques.
Fondation du patrimoine. Pour faire un don.

Quand les cathédrales étaient peintes ↑ 

(En cours décriture).
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Le signe de Tau, 1144; © Creative Commons by NCSA (attribution: Michel Racine, pas d'utilisation commerciale).

Les vitraux (détails) ↑ 

Si on peut dire que l'art gothique est né à Saint-Denis, l'art du vitrail gothique lui est indissolublement lié. La dation de la série de vitraux des prophètes (dont 5 subsistent) de cathédrale de la Visitation d'Augsbourg (romane) est discutée. Ils seraient contemporains de ceux de Suger à Saint-Denis, mais plus anciens d'un siècle pour d'autres. Une tête de Christ provenant d'un panneau plus important, conservée au Musée de l'Œuvre Notre-Dame à Wissembourg (France) est datée pour pour certains de 1060, une dation elle aussi discutée.

De ce fait les vitraux installés par l'abbé Suger en 1144 constituent une innovation exceptionnelle, aussi importante que les piliers du déambulatoire. Même si les originaux des vitraux qui subsistent sont actuellement conservés en laboratoire et remplacés par des copies fidèles, la présentation actuelle est un des plus anciens témoignages de l'art du vitrail figuratif en place dans une église.

Mausolé royal  ↑ 


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Priants de Louis 16 et de Marie-Antoinette, installés par Louis 18 (circa 1830). © Michel Racine
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L'autel conçu par Vladimir Zbynovsky en travertin d’Arménie et verre permet de projetter, depuis 2018, une croix de lumière dans la crypte.; © Michel Racine.

La basilique de Saint-Denis est un monument pluriel. Les tombeaux des rois constituent à eux seuls un musée de l'histoire de la sculpture française depuis le 13e siècle. La lumière qui traverse la dalle de verre et la fenêtre en croix ménagée dans le moderne autel du 21e siècle éclaire les sarcophages mérovingiens. La basilique de Saint-Denis ne se classe pas dans une période de l'histoire, elle est l'histoire. La basilique de Saint-Denis est un monument dédié au culte, mais son rôle politique a été éminent. Et ellea survécu à une vie des plus mouvementées.

Puissions nous en apprendre que nous ne pouvons perdurer que dans la diversité et le respect mutuel. C'est la définition même de la laicité et c'est celle que nous enseigne l'église la plus emblématique de l'histoire de France.

Nos goûts peuvent changer mais peu importe, le futur se construit à la fois en conservant le passé et en innovant par rapport au passé.

En pratique

L'accès à la nef est gratuit mais les visites touristiques sont déconseillées pendant les messes. L'accès aux monuments funéraires royaux, à la crypte et au déambulatoire est payant (consultez le site dédié des monuments nationaux: lien ci-dessous). Les visites guidées sont à la hauteur de l'histoire de l'édifice: leur intérêt est exceptionnel; je conseille l'hiver où l'affluence est moindre.

Références

 ↑ Cathédrale de Saint-Denis. UNESCO (Tentative List).

 ↑ Jules Formigé. 1960. L'Abbaye royale de Saint-Denis. PUF.

 ↑ Anne-Marie Romero. 1992. Saint-Denis, la montée des pouvoirs. Presses du CNRS.

Michaël Wyss. 2013. Saint-Denis: évolution d'un paysage urbain vue au travers de l'archéologie in Comprendre les paysages urbains. Actes du 135e Congrès national des sociétés historiques et scientifiques, "Paysages". Neuchâtel, 2010. Paris, Editions du CTHS, 2013. pp. 73-87. (pdf);


Michaël Wyss, Thomas Clouet, Jean-Pierre Gély. 2018. Les portails de la façade occidentale de Saint-Denis in Damien Berné et Claire Betelu (dir.), A fleur de pierre. Dix ans de restauration des portails à statues-colonnes, actes de la journée d'étude "Actualité des portails du premier art gothique". INHA, Paris site de l'HiCSA, mis en ligne en février 2022, p. 10-29 (pdf).

Michael Wyss. . Saint-Denis. in Bernard Gauthiez, Elisabeth Zadora-Rio et Henri Galinié. Village et ville au Moyen Age. p. 221-241 - Vol. 2.

Jean-Michel Leniaud. 1949. Viollet-Le-Duc ou les délires du système. Menges.
Jean-Michel Leniaud. 2018. François Debret, architecte romantique. Centre des monuments nationaux.
Le livret de l'exposition 2018-2019.

Bibliographie

Basilique cathédrale de Saint-Denis. Le site officiel des monuments historiques.
Fiche de visite (monuments nationaux).
Visite virtuelle.